Bandeau
Cales des chantiers Église Saint-Michel

1670

Rue Dos d'Âne


Contrairement à Pirmil, Dodane – dont l’orthographe peut également varier en Dosdane, Dosdasne, Dos d’âne, etc –  est un véritable hameau. Village-rue élevé entre la rive du fleuve et le coteau, Dodane fait la liaison entre les deux ponts – celui de Pirmil et celui de Pont-Rousseau.

Une route commerciale importante pour la ville

Le fonctionnement de la route commerciale est aussi vitale pour Dodane que pour le centre-ville de Nantes ; la Ville surveille donc attentivement la praticabilité de cet axe ainsi que le révèle ce procès-verbal de police : « […] Il s'agissoit de l'enlèvement de décombres qui étoient dans la rue Dosdanne, située dans l'un des faubourgs de Nantes; ces décombres ôtoient la liberté du passage, ils empèchoient la communication des habitants des environs, surtout avec les provinces limitrophes. Cet objet intéressoit la Police de la Ville, le bien du commerce et celui du Public [...] ».

Dans le même esprit, l'intendant de Bretagne ordonne le 6 septembre 1724 « […] aux propriétaires des maisons situées dans les rues de Pont-Rousseau et Pirmil, de faire réparer, chacun en droit soi, les pavez desdites rues, dans quinzaine. »

Le souci constant de la praticabilité de la route pousse la ville à agrandir cet axe lors des travaux de reconstruction du Pont-Rousseau entre 1770 et 1780. Les maisons de type rural élevée à l’entrée du pont sont détruites, d’autres sont achetées par la communauté pour constituer une réserve foncière. Un alignement est proposé par l’architecte-voyer Ceineray.

Consolidation des atterrissements pour empêcher les inondations

Les maisons s’étagent sur la rive entre la Loire et la Sèvre. Grâce aux atterrissements qui s’amalgament à la rive, Dodane a dû avoir une extension importante entre le Moyen Age et le 18e siècle. Mais, ce sont les travaux de consolidation des atterrissements que la Ville entreprend vers 1770 qui prolonge la Sèvre et éloigne le point de confluence de la rive de Dodane tout en lui conférant sa forme caractéristique. À cette occasion, des digues sont également mises en œuvre au niveau du Seil et sont ensuite régulièrement entretenues jusqu’à la Révolution.

Avant ces travaux, la rive devait être régulièrement soumise aux inondations. Les dégâts accusés par celle de 1698 ont fait l’objet d’une description : « Estants au faubourg de la Saulzaye, nous avons veu ledit faubourg inondé d'eau, depuis l'entrée d'icelluy jusqu'au-delà du moulin du Chapitre, ce qui nous a obligé de nous mettre en batteau pour nous faire passer le long dudit faubourg pour aller veoir et visiter les autres ponts. Et estans à l'entrée de celluy (le faubourg) de Bièce, nous avons aussi esté obligés de passer en deux endroits d'icelluy en batteau, et pareillement au bout du faubourg de Vertais ; comme aussi depuis l'entrée du faubourg de Dos-d'Asne, jusque au pont de Pont-Rousseau, où estans, nous avons veu les eaues sur lesdits ponts, qui commançoient à enlever les madriers, ce qui nous a obligé pour esviter la perte d'iceulx ponts, de donner ordre de faire charger lesdits ponts, sur deux passées, d'un nombre de dix briques plaines d'eau, sur chacun qui estoient prest d'estre emporté par les eaux. Et estans retournées sur le pont de Vertais, du costé de Piremil, nous avons veu ledit pont prest d'estre enlevé par lesdites eaux, et la pescherie de dessous emportée par icelles, ce qui nous auroit aussi obligé de faire mettre huit bariques plaines d'eau sur ledit pont, pour charger iceluy, et pareil nombre sur celluy de Toussaints, comme aussi avons fait mettre vingt-quatre bariques plaines d'eau, douze sur le pont-à-vis le moulin du Chapitre, et douze à vis celuy de la ville… »

Les conséquences de ces inondations pour les habitants sont souvent terribles. Au début du 18e siècle, le maire Georges Mellier écrit à l’intendant de Bretagne que « les habitans de Vertais et Pilmil, […] sont venus plusieurs fois me trouver, pour me prier de faire procès-verbal des dégradations de leurs maisons et des pertes qu'ils avoient souffert ; mais je leur ay répondu qu'ils devoient s'adresser à vous et vous prier de leur donner un commissaire. Il est certain que leur situation est déplorable [...] ».

Entrepôts et industries

Malgré ce risque annuel, la rive attire de nombreux négociants qui installent à Dodane des fabriques et des entrepôts. Les sieurs Guillou, Orrillard et Metzener y ont construit une manufacture de « petites toiles » destinées aux cargaisons de la traite des noirs. Par économie, à raison de la concurrence, cette fabrique emploie beaucoup de femmes ce que reprochent âcrement les ouvriers imprimeurs d'indienne qui mettent les fabricants en demeure de renvoyer ces femmes. Consciente de ce potentiel, la Ville avait en 1741 fait construire sur la Sèvre, au débouché du pont Rousseau, une cale sur les plans de Nicolas Portail.

La dimension industrielle du faubourg se consolide au 19e siècle et perdure jusqu’au 20e siècle : en 1914, l’en-tête de la savonnerie de la Sèvre, spécialisée dans les savons parfumés, suggère un quartier industrieux au débouché du Pont-Rousseau.

Les ports Sablé et Cassard

Ce déploiement se fait malgré le défaut d’aménagement de la rive et de sa protection par un quai. Les industriels doivent donc aménager eux-même des débarcadères et des pontons sur la rive de Dodane ou utiliser les cales aménagées le long de la Sèvre où le long du pont de Pirmil.

Sur la rive de Dodane, un petit port d’échouage, le port Sablé se met en place. Il est voisiné par une cale mise en place dès 1840. Cette cale en abreuvoir subvient aux besoins des habitants, en particulier pour faire boire les animaux. Mais dans la seconde moitié du 19e siècle, les différents services de gestion du Port, l’utilise pour des activités encombrantes qui gênent le fonctionnement des quais du centre-ville. Les déchireurs de bateaux s’y installent donc. Les élus s’indignent que « sans prendre en considération les dépenses importantes faites par la Ville, dans l’intérêt d’un quartier populeux [le service des Ponts et Chaussées] entend se réserver la faculté d’autoriser sur la cale […] au profit de quelques individus et à sacrifier les intérêts de tous les autres qui ne pourraient plus s’en servir comme lieu de débarquement pour les marchandises.

L’autorisation de pratiquer cette activité fait évoluer le statut de la cale : équipement public, elle est plus ou moins privatisée au début du 20e siècle et selon l’usage en vigueur à Nantes depuis le 18e siècle, elle prend alors le nom de son utilisateur principal « Port Cassard ». En 1956, ce petit aménagement est encore visible mais disparaît vers 1970.

La physionomie du quartier est conservée jusqu’aux années 1980 lorsque la Ville engage la transformation du quartier Esnould des Châtelets.

L’intégralité du bâti ancien est alors rasée pour pouvoir reconstruire le pont et aménager la zone qui devient l’une des stations de la nouvelle ligne 2 du tramway.

Direction du patrimoine et de l'archéologie, Ville de Nantes / Nantes Métropole ; Service du Patrimoine, Inventaire général, Région Pays de la Loire
Inventaire du patrimoine des Rives de Loire
2021

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